Watermael-Boitsfort, trois degrés
Ce fut le mois de mars le plus froid depuis cinquante années. Il n'y eu pas de répit, il n'y eu qu'un long hiver qui empêcha les oiseaux de chanter et l'herbe de pousser. Les fleurs moururent petit à petit, l'eau chaude ne suffit pas à la réanimer. Les bourgeons tombèrent comme des grains de raisin sec, contre la vitre de la cuisine, sur Edouard de Grijsestaat. La neige ensevelit le parc Roi Baudoin, les tilleuls blonds de la forêt de Soigne, les petits chemins le long de la Woluwe. Les mois ne sont qu'un hiver, simple et silencieux, infini, éternel.
Sur le plan de travail, mon existence toute fraiche, un vrai poisson de rivière. La surface est nette, les écailles sont glissantes. Je me coupe un bout de peau, je tranche, je décape. Il ne restera rien si je m'égare. Mais pour l'instant c'est bien le plus joli repas, la cène au grand complet, la plus belle eucharistie. Une délicieuse odeur d'ail rissolé, d'aubergines, ciboulette fraiche, saumon délicatement fumé. Chambre douce, à peine éclairée.
Une langueur.
Quelques heures les yeux fermés loin du délire.
Seulement ces corps appétissants et ces cœurs qui palpitent comme de petits oiseaux dans la pénombre. Ils battent fort, ils tambourinent contre les torses, ils veulent s'envoler, se foutre dans le ciel. Ils ne désirent nulle convention. Juste l'union de chair et de souffles mêlés. Juste le retour dans le secret de la naissance. Dans l'intérieur feutré, dans le désir, dans le sanguin.
Ce fut le mois de mars le plus froid depuis cinquante années. Il n'y eu pas de répit, il n'y eu qu'un long hiver qui empêcha les oiseaux de chanter et l'herbe de pousser. Les fleurs moururent petit à petit, l'eau chaude ne suffit pas à la réanimer. Les bourgeons tombèrent comme des grains de raisin sec, contre la vitre de la cuisine, sur Edouard de Grijsestaat. La neige ensevelit le parc Roi Baudoin, les tilleuls blonds de la forêt de Soigne, les petits chemins le long de la Woluwe. Les mois ne sont qu'un hiver, simple et silencieux, infini, éternel.
Sur le plan de travail, mon existence toute fraiche, un vrai poisson de rivière. La surface est nette, les écailles sont glissantes. Je me coupe un bout de peau, je tranche, je décape. Il ne restera rien si je m'égare. Mais pour l'instant c'est bien le plus joli repas, la cène au grand complet, la plus belle eucharistie. Une délicieuse odeur d'ail rissolé, d'aubergines, ciboulette fraiche, saumon délicatement fumé. Chambre douce, à peine éclairée.
Une langueur.
Quelques heures les yeux fermés loin du délire.
Seulement ces corps appétissants et ces cœurs qui palpitent comme de petits oiseaux dans la pénombre. Ils battent fort, ils tambourinent contre les torses, ils veulent s'envoler, se foutre dans le ciel. Ils ne désirent nulle convention. Juste l'union de chair et de souffles mêlés. Juste le retour dans le secret de la naissance. Dans l'intérieur feutré, dans le désir, dans le sanguin.