Archive for novembre 2010

Grande Réserve

29 novembre 2010 Comments Off

Les bouteilles de Champagne cuvée hiver avancé valsent dans mon crâne.
C'est un dimanche moche et ordinaire où on l'est encore en vie et où l'on se célèbre quand même. Comme quand tu danses à sept heures du matin quand je viens d'ouvrir les yeux.

Je ne travaille plus dans ma tête c'est jackpot intérieur à toute heure, les promesses de voyage s'accumulent comme autant de promesses faites à nous même de vivre à feu et à sang. Dehors c'est la guerre, je suis imperméable. Peu importe la durée de cette trêve entre tes bras. Le Nouvel an sera sur la Costa Brava. Rien est irréalisable, alors. Quand je cours dans la gare le matin le long de ce couloir interminable, je fais des sauts de chat je slalome dans la foule, je joue au funambule sur le chantier en face de la Gare sur la rue Pierre Sémard, je fais des plans sur la comète et puis tant pis si un jour tout me tombe sur la tête.

Et puis San Francisco.
Bleu du ciel, soleil filigrane par les persiennes de mon cerveau: une baie translucide, odeur de sel et d'essence. De sueur. De peau qui se dévoile, je veux l'été avant l'heure.

Lyon a pris un manteau de fête criard mais agréable, et le temps est moins glacial qu'au coeur de la Villeneuve quand je marchais contre les éléments entre deux HLM. La neige endort la rue, animal enragé piqué au froid.

Regional Express

Comments Off

Le ciel est si bas qu'on pourrait effleurer les nuages du doigt et se fondre dans la brume, coton d'anonymat. Devenir cette foule d'inconnus, devenir les rues et les champs gris, les bruyères, les petits ruisseaux et les morceaux de buis. La route de Grenoble dans le paysage givrant et les feuilles mortes est d'une tranquillité morbide. Le train glisse dans l'hiver, sur ce trait de suif entre les montagnes et leur linceul blanc. A l'intérieur du régional express il y a comme un recueillement dans le silence, l'appareil à annonces est cassé, la lumière aussi. 

C'est comme si l'aube n'allait jamais se lever, que ce sera l'aurore tout le temps des cimes jusqu'aux vallées, et qu'on va continuer cette route entre les cols, machine magique et mystérieuse, jusqu'à l'Italie, rouler vers les lacs et leur surface miroir et leur infini calme. Traverser Vérone, Côme, les cours d'immeubles ornementées, les jardins. Et puis poursuivre à l'Est, infiniment. Infiniment s'étirer dans la brume, se ceindre de brouillard. Rendre mes mains, mes yeux, me disperser à l'étang. Dissoudre le physique, chaque atome, ôter l'obligatoire. 

A présent, je suis seulement mon Cœur, petit rouge palpitant, traversant la vitre, voguant toutes veines dehors à travers les montagnes. L'aorte à la nature, nue dans un champ de blé à moitié mort à moitié germé. La Tour-du-Pin, Voiron. Il parait si loin ton corps, chaud, humain, réconfortant.

L'Ange dans la Villeneuve

23 novembre 2010 Comments Off



Grenoble, Garder l'éclat de ton regard dans le gris pré nuptial
Un degré avant neige,
coursive vingt-deux bâtiment C
Arlequin nord, milles murs et milles escaliers.

Faire banlieue buissonnière un jour sur deux, me rompre les os entre ces cathéters immenses et cimentés. Je ne sais pas aller en cours toute la journée, toute la journée me fondre dans cette jungle humaine, leur parler. Je préfère les ballades entre les arbres qui sortent des fenêtres, les petits ponts suspendus entre les allées, les bâtiments qui s'enchevêtrent, les salles de bains à l'air libre, les loubards, la Villeneuve oubliée, les tags sur les flancs, les hanches du quartier abruptes et tatouées. Le manque et l'angoisse se côtoient, on sent que c'est l'hiver et que ça pue l'exil, et puis que je me suis plantée de ville. Une furieuse envie de rentrer m'emporte à bout de bras. Ce que je fais ici, je ne sais toujours pas. La vie est mieux quand elle est avec toi, que tu sers du champagne un lundi sans raison mais qu'il y en aurait mille. Quand tu joues avec la corde, avec mes cheveux, avec mes mains. Au fond des cercles creusés dans les murs de refend je me défais. La nuit tombe vite, la fête est loin. Il ne reste que les reliefs de repas pour les chats dans le petit parc mort de la Cité Arlequin. Le bruit d'une fusillade, l'odeur des joints fumés avec quelques inconnus au fond d'un local noir, en attendant que les fous-furieux passent. Les chansons italiennes fredonnées par un certain Khaled édenté au sourire de mon père. Une bière prise au hasard devant la salle d'attente du dispensaire de la rue Constantine. Je n'ai plus de quoi payer le laboratoire. Grenoble pauvre et salie par la neige envahissant les rues. Ça sent l'exil, mais je préfèrerai être ailleurs. Le long de la Costa Brava.

Le souvenir de la mer

18 novembre 2010 Comments Off

Le port de Barcelone, octobre 2010

Dès que tu reviens, quelque chose en moi se tort et se retourne, s'agenouille à tes yeux, à l'autel du hasard.
Solaire, ta nuque sous la couette, c'est mon petit matin.
Celui que je ne vois plus, aveuglée dans le train.

Ce soir sous le pont ferroviaire, dans cette solitude abrupte qui fait de novembre une nuit constante et lourde et un peu douloureuse, je marche brutalement. Mes jambes griffent l'asphalte jusqu'au PVC moche de la gare Rive de Gier, jusqu'au parquet ancien après le cours Vitton. Faire mourir mes pieds, mon corps et tout ce qui reste sur le canapé, entorse de fin de journée. Et dès que tu reviens, fondre jusqu'à ton cou, glisser dans le tout calme, s'arquebouter jusqu'au bout de ta petite main jusqu'au creux de tes bras où le vacarme meurt. Ni bruit des machines mondes, ni sytèmes à deux balles. Ni presse gratuite hostile, ni foules anonymes. Un bonheur tranquille grille les mondanités. Rien ne sert de parler.

Emmène moi encore, où tu veux ça m'ira, Barcelone ou Berlin, Sourdun ou Ankara. Je sais que mes faiblesses m'accompagnent, comme un fidèle amant. Que j'ai peur que tu me laisses sur un coté de route, que j'ai peur des nuits sans tes bras des nuits sans moi sans ton odeur sans saveur, de Grenoble et du froid.

Enchâssée entre les montagnes, ne reste que le souvenir de la mer. A Lyon les feuilles rougeoient dans le parc quand il y a quelques semaines nous riions dans le sable, prenions des tramway climatisés au hasard enlacées aux stations. La plage était musicale et les jambes dénudées, les terrasses la nuit étaient bondées et l'on vivait pour quelques temps sur le lever de soleil place Catalunya, sur les marchés catalans fleuris de fruits et d'épices, sur cette terrasse du bari gothic où je t'aurais presque épousée. Les rues étaient bordées de palmiers autant que de touristes, ça sentait la charcuterie locale, les petits poissons et le chocolat chaud. Les parcs étaient si lumineux que les photos sont blanches.

Bip bip strident au fond de la mezzanine de bois sombre,
Obscur mardi matin sept heures un neuf novembre.
Anachronisme brut du bruit des mouettes sur la corniche de Barceloneta.
Sur ton parfum, animal et suave, juste à côté de moi
Il est samedi quinze heures, avril entre les draps.