Nantes, un dimanche de mai
Le long des bords de l'Erdre, pâle dimanche de mai. Une seule phrase flotte dans ma tête quand elle est contre toi. Au fond de la verdure des canoe kayak font des sportifs vas et viens et les petits enfants encore emmitouflés se faufilent entre les arbres autours d'adultes en pull marin un peu blasés. Le ciel est bas comme en Ecosse et dans ce jour chômé et à la fois férié, seuls les trains semblent encore fonctionner. Mais pour l'instant ma main est dans la tienne et l'on se balade en faisant semblant d'oublier que dans quelques heures je serai à nouveau sur le quais. Les étreintes peuvent attendre, le vent souffle délicatement entre les feuilles il ne pleut presque pas. Je pourrais rester je me vois déjà faire cuire des petits poissons dans cette cuisine blanche, monter et redescendre l'escalier de bois avec mes talons, oublier mon maillot dans la salle de bain, faire du vélo le long de l'Erdre. Et cette phrase qui ne me quitte pas, qui siffle à mes oreilles :
I may not have gone where I intended to go, but I think I have ended up where I needed to be.
(Douglas Adams).
A quelques centaines de kilomètres de là, diagonale brutale : j'ouvre les yeux ce rêve récurrent où je perds des dents, il y a un trou sombre entre les Montagnes comme un sourire en coin, le paradis est loin ici l'eau est un caprice alpin glacé malgré une chaleur suffocante qui me rend accablée. Plus de quoi prendre un café, parfois plus de quoi manger, une fierté déplacée m’empêche de prendre un téléphone et de faire l'aumône à mon père coincé dans son désert, de faire l'aumône à ma mère entre deux géraniums de banlieue. Je fais l'inventaire de l'appartement : il n'y a plus rien à vendre si c n'est l'ordinateur, des livres, mon corps et l'imprimante HP. Le futur parait aussi être un grand trou noir, plein de possibilités immatérielles et de frontières à traverser. Quand je ne sais pas vraiment où j'ai l'intention d'aller, mais que je sais si bien où j'ai besoin d'arriver.