Bien aimée

30 juillet 2011 Comments Off

Emerger, le corps à moitié contre le rebord de la fenêtre, à moitié dehors. Les téléphones sonnent de part et d'autre de la pièce, des tonalités nouvelles. Communications internationales, bip bip anglais d'une cabine rouge que tu as eu un mal fou à trouver. Désormais il faudra se donner des rendez-vous ici, chacune à un point de la terre, avec une heure de décalage horaire. Plusieurs messages clignotent sur mon portable me rappelant qu'un an de plus a passé. Belle année.

Le dernier week-end d'été, c'était il y a une semaine. J'avais débarqué d'un nouveau TGV direction Toulouse, une ville où je n'ai jamais mis les pieds. Je suis descendue à Montpellier. A vingt et une heures le vent était frais, tu m'attendais devant la voiture 7, apparition divine. Une auréole de soleil flottait au dessus de toi, de la Renault cassée, de tes parents. Nous avons roulé jusqu'à cette maison en pilotis au dessus de l'Hérault, il y avait un air antique dans les paysages d'oliviers et de vignes, dans l'odeur des animaux, des vergers, des champs. Nous retrouver dans le jardin d’Éden, il y a dix mille ans. Ramasser les pêches tombées, les melons. Tout autour de nous, seulement la nature, ce ciel intemporel qui pourrait être celui d'il y a des siècles. Les étoiles sont aussi nombreuses qu'à Khalsa, et comme je n'en avais jamais vu en France. Quand je restais à regarder la nuit avec Sabrine, toutes les deux blotties sous un tapis dans la cour de Mima, ni elle ni moi ne connaissions ni l'étoile polaire, ni les constellations, on se contentait de cette captation mystique. Il n'y a de toute manière jamais eu personne pour nous expliquer le tableau, surement qu'aucun des familiers dormant entre les quatre maisons ne connaissait ce genre de composition. Alors ce soir là avec toi, je t'ai dit que je ne savais pas. Tu m'as montré la petite et la grande ourse, allongée sur le système d'irrigation, mes pieds étaient réchauffés contre le pelage d'un gros chien totalement inconnu.


Finir cette période de vas-et-viens franco-française au bord d'une piscine privée, entre deux apéritifs. T'enlacer comme si d'un clin de cil j'allais te perdre à l'intersection d'une ruelle. Te serrer la main comme si je n'allais plus jamais la rattraper, ni sur cette place de village à la nuit tombée, ni ailleurs, ni nulle part. Nous prendre à bras le corps comme si je n'allais plus jamais te retrouver. Te faire comprendre, te transmettre, te dire. Tout ce que je ne pourrais plus te donner par la suite. Te sentir, te toucher, te chérir. Téléportation à l'arrêt d'un tramway en périphérie d'agglomération, Les yeux rivés sur le plan des transports en commun, embué. Même le regard des passants a cet air d'au-revoir. Je pleure bêtement, je ris en même temps. Nous nous délaçons à une station. Toi direction l’aéroport, et moi jusque la gare, éternellement la gare.

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